La journée s'était annoncée comme tranquille, aujourd'hui. Tu t'étais levé assez tôt, peut-être même un peu trop comparé à l'heure à laquelle tu avais été te coucher... mais tu avais pas mal de choses à voir à ta maison de haute couture. Dire que tu avais racheté cette entreprise pour presque rien et que maintenant, elle était mondialement connue ! Il fallait bien avouer que de t'avoir en effigie avait pas mal aidé. Ton habileté à pouvoir t'habiller dans les deux genres et paraître naturel était ce qui faisait ta renommée, entre autres.

Comme la météo était clémente et qu'il ne faisait pas froid, tu avais décidé de partir en moto, sans mettre de veste. Tu avais néanmoins mis un casque, ne serait-ce que par prudence au vu de ta conduite que tu définissais comme "rapide"... là où d'autres disaient que tu étais dangereux et qu'il ne fallait pas te confier une voiture. Tu avais mis un bon vingt minutes pour arriver. Tu saluas chaleureusement tes employés, jetant un œil aux nouvelles créations à venir, vérifiant les prochains défilés prévus. Rien de très important dans les jours suivants.


"Mister Hadler ! Mister Hadler !"

Tu te retournas en entendant une petite voix te héler. Une petite rousse frisée à lunettes, agenda dans une main, agitant l'autre en gestes frénétiques, courait dans ta direction. Il était fréquent qu'elle t'interpelle, mais le plus souvent, elle attendait que tu passes devant son bureau.

"Karen... Combien de fois vous ai-je demandé de ne pas m'appeler Mister ? Ca ne me va pas, ça me vieillit..."

"Désolé, Mister... je veux dire, Monsieur... C'est que..."

"Allons, du calme. Respirez un coup. C'est inhabituel pour vous de me courir après."

"Ah, navrée... C'est que... j'ai un appel important d'un fournisseur, et il vous demande spécifiquement..."

Tu la suivis jusqu'à son bureau, prenant l'appel que ta secrétaire avait mis en attente. Apparemment, il avait reçu un paiement moins important que celui prévu et convenu. Chose qui n'était pas normale du tout... Tu pris note des deux montants, assurant que tu allais régulariser tout cela rapidement. Un bref soupir t'échappa après que tu aies raccroché. Ca commençait bien.

"Tout va bien ?"

"Un léger souci. Karen, dites-moi, vous avez bien accès aux comptes ?"

"Oui, monsieur Hadler."

"Parfait. Alors, voici ce que vous allez faire..."

Tu lui donnas tes instructions. Tout d'abord, régulariser la somme due. Ensuite, tu la chargeas de mener l'enquête auprès des autres fournisseurs, afin de savoir s'il s'agissait d'un cas isolé ou non. Tu lui demandas de n'en parler à personne tant que l'affaire n'était pas tirée au clair.

"S'il s'agit d'une erreur, je discuterai en privé avec le responsable. Pas de quoi faire un scandale. Dans le cas contraire..."

"Autre chose ?"

"Non, cela ira. Je vais repartir, vous savez où me joindre en cas de problème."

Tu sortis du bureau, pensif. D'un côté, tu espérais qu'il s'agisse d'un oubli, voire d'une erreur. De l'autre, tu doutais du fait que cela puisse être accidentel. Tu te dirigeas vers ta moto, t'asseyant dessus et faisant vrombir le moteur un moment avant de prendre la route. Tout le temps du trajet, tu ne pouvais t'empêcher de repenser à cet incident. C'était certes la première fois que cela arrivait, mais tu avais investi tellement de temps dans cette société... tu préférais ne pas songer à ce que tu ferais si c'était un sabotage.

Tu n'étais plus très loin de chez toi, quelques mètres te séparaient de ta maison. Tu roulais comme toujours au-delà des limitations de vitesse. Au moment où tu allais envisager de ralentir, un gamin traversa devant toi sans prévenir, t'obligeant à faire un mouvement brusque afin de faire une embardée et de l'éviter. Mais écart soudain associé à la vitesse te valut de perdre le contrôle. Tu tentas de freiner en posant un pied au sol... Bien mal t'en prit, puisque tu sentis ta cheville te tordre assez vivement, te faisant grimacer de douleur. De plus, tu fus emporté et tu te retrouvas à faire un assez méchant dérapage sur le dos, récoltant quelques égratignures sans grande gravité au niveau du dos et des épaules.


"Aïe..."

Encore secoué et sous le choc, tu essayas de te relever doucement, abandonnant rapidement l'idée face à la douleur qui te vrilla la cheville. Tu te redressas péniblement afin de t'asseoir et de ne plus avoir ton dos sur le macadam de la route, retirant prudemment ton casque.

"..."

Tu étais bon pour plusieurs semaines à rester alité, et il allait te falloir quelqu'un pour te tenir compagnie le temps que ta cheville se remette... Mais l'accident avait bien dû attirer l'attention de quelqu'un. Quelqu'un allait certainement venir et t'emmener faire un tour à l'hôpital, pas vrai ? A moins que cette personne n'ait d'autres plans en tête...